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gers font une apparition bruyante : ce sont deux compatriotes. Mais je suis mal tombé : les nouveaux venus affectent le type du boulevardier fanfaron, du commis-voyageur en demi-gros et en calembourgs. « Garçon, avez-vous quelque chose de mangeable à nous donner ! Garçon, ne vous fatiguez pas à nous parler allemand ; nous ne comprenons pas un traître mot de cette jolie langue. Quest-ce que cest que cette horreur- que vous nous apportez, garçon ! cest sans doute un plat national ? comme plat na­tional, je le respecte ; mais je me garderai bien dy toucher..., etc., etc. »

On conçoit combien ce gracieux laisser-aller me met mal à laise, surtout en présence dune demi-douzaine dofficiers wurtembergeois , qui écoutent en man­geant, sans mot dire. Yoilà un repas manqué : javale quatre à quatre les morceaùx qui me tombent sous la main et je me sauve pour respirer le grand air.

On se demande souvent pourquoi les étrangers préfèrent les Anglais aux touristes français, « le peuple le plus spirituel de la terre ! » Avez-vous jamais vu un Anglais prendre ce ton gouailleur dans un hôtel quelconque ?

Strasbourg, octobre.

Je crois avoir jugé les Allemands que jai rencon­trés, sans me laisser emporter par des rancunes