DEUXIEME GROUPE.
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un peu fraîches, elle n’est pas sensible aux influences météorologiques, et les soins de sa culture se donnent au gré du cultivateur. Voilà des mérites qui ont bien leur prix, surtout quand ils s’accompagnent d’un rendement de 30 à 40 quintaux de racines pouvant valoir de 70 à 80 fr. chaque. Mais ce produit se vend mal, faute de débouchés^ et parce que les marchands du Comtat, qui ont le monopole de ce commerce, sont les seuls acheteurs. Il est donc indispensable, pour que cette culture puisse se développer pratiquement en Algérie, qu’il s’y élève des établissements pour le traitement de la garance, dans lesquels on sécherait les racines à l’étuve pour les pulvériser ensuite ; puis, de la poudre, traitée par lexivi- gation, on extrairait le principe sucré dont on ferait de l’alcool, tandis que le résidu séché servirait comme garance lavée ou pour la préparation de la garancine. Cette industrie, qui fait la prospérité d’Avignon, peut s’établir, avec chances de succès en Algérie, en empruntant son moteur aux chutes d’eau, et elle pourrait très-avantageusement se combiner avec d’autres industries agricoles, notamment la distillerie.
Le henné (Henna en arabe) est la poudre des feuilles du Lawsonia inermis, L., qui sert dans tout l’Orient islamique à teindre en brun orangé les ongles, la paume de la main et les pieds des femmes et des enfants, et qui constitue l’un des principaux remèdes de la médecine indigène. Cet usage remonte à une haute antiquité, car il était pratiqué par les Israélites et les Egyptiens dont on retrouve encore les momies teintes avec cette matière. Elle provient d’un arbuste peu cultivé dans le Tell, et seulement aux environs de Mostaganem et de Blidah (chez les Béni Krelil), mais surtout dans le sud, à Biskra, dans les Ksours et au Touat. Le henné contient un principe tannant très-énergique qui l’a fait rechercher par la maison Gillet et Parron, de Lyon, pour la teinture des soies en noir ; mais son prix assez élevé (150 à 200 fr. le quintal) empêche l’industrie d’utiliser ses remarquables propriétés. Il est douteux que le Tell arrive à produire le henné à aussi bon marché que la région saharienne, car cette plante réclame une forte chaleur, et même sous ce ciel de feu elle ne souffre pas d’ombre ; en revanche il lui faut des arrosages fréquents. Aussi les rendements qu’on accuse dans le Sud sont-ils de beaucoup supérieurs à ceux du littoral. Une plantation bien entretenue, à Biskra, arrive à rendre dans sa quatrième année 45 quintaux de feuilles. Elle dure de 15 à 20 ans et même plus, et la qualité du produit va en s’améliorant avec l’âge. En outre des feuilles, cet arbuste donne des fleurs blanches à odeur très-forte, dont on retire une huile essentielle fort goûtée des orientaux, et les jeunes branches s’emploient aux mêmes usages que l’osier.
Le carthame (Carthamus tinctorius, L., en arabe Kheurtoum) ou saffra- num, constitue par ses fleurons une matière colorante autrefois très employée pour la teinture en rose ou en ponceau sur laine et sur coton, mais