ACCROISSEMENT DU BÉTAIL.
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Le fait de la diminution des troupeaux dont on s’est beaucoup ému en France, dans ces derniers temps, n’est donc pas particulier à notre pays. C’est un fait général que l’on doit attribuer au défrichement des landes et à la substitution des grosses et moyennes races, aux petites : la crise des laines, qui s’est fait sentir avec une très-grande intensité de 186o à 1869, n’a pas peu contribué aussi à faire diminuer l’importance des troupeaux au profit du gros bétail.
Cette diminution n'indique pas toutefois une décadence dans l’élevage, ni une diminution dans la production animale.
Le nombre n’est pas en effet un élément suffisant d’appréciation ; car deux moutons dont l’un pèse le double de l’autre constituent bien pour la statistique deux animaux, mais ces deux bêtes ne sont nullement équivalentes, puisque l’une vaut le double de l’autre.— La statistique, pour donner la vérité, devrait donc, à côté du nombre, indiquer le poids vif de chaque catégorie d’animaux : or, pour l’Angleterre il est incontestable que les 17 millions de moutons qui constituaient l’effectif de 1800 ne sont nullement comparables aux 17 millions de moutons dont l’existence a été constatée en 1871 : — D’après Lucock, agronome du commencement de ce siècle, un mouton anglais donnait en 1800 à l’âge de 3 ans 1/2 à 4 ans, 28 kil. de viande ; aujourd’hui, à 2 ans seulement il en fournit de 3o à 40 en moyenne, donc avec le même nombre de] bêtes, l’agriculture anglaise produit près de 4 fois plus de denrées animales par an !... Ajoutons que de 1860 à 1873, le poids vif des animaux a continué à augmenter. Il est toutefois impossible de trouver dans ce progrès une compensation à la décroissance du nombre de moutons depuis 1860.
Mais la diminution d’un produit importe peu s’il y a, d’autre part, augmentation équivalente d’une denrée analogue. Le mouton est surtout élevé en Angleterre comme machine à faire de la viande; la laine est l’accessoire, puisque l’Australie, avec ses immenses troupeaux, est en état de pourvoir largement à tous les besoins de ses manufactures ; or, s’il en est ainsi, le cultivateur n’a plus qu’un but : chercher la machine animale qui, pour une même quantité de fourrage, lui fournisse au meilleur marché le plus de viande.
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